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27 mai 2024

Agriculture de petite surface : l’injustice climatique

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Si les effets des changements climatiques se font ressentir différemment, ils sont concrets et visibles partout. Et les agriculteur·rice·s de petite surface sont particulièrement touché·e·s alors qu’ils et elles ont contribué et contribuent si peu aux émissions de gaz à effet de serre.

Interview de Amadou Diarra, producteur de maïs, de sorgho, de mil, de riz pluvial et de semences, président du comité d’achat de céréales et animateur en sensibilisation, au Mali.

Que savez-vous et que percevez-vous du changement climatique ?

On se rend compte aujourd’hui qu’il y a un changement et on en ressent les effets. Aujourd’hui, il y a moins d’arbres et d’arbustes qu’avant. Auparavant, la saison des pluies s’étalait de mai à octobre ; maintenant il ne pleut qu’à partir de mi-juin ou début juillet. Nous avons aussi des problèmes de fertilité et d’érosion qui sont plus fréquents.

Est-ce que ces changements ont eu un impact sur vos pratiques en tant qu’agriculteur ?

J’ai pu suivre des formations de différents partenaires ce qui m’a permis de comprendre toutes les techniques pour adapter mes pratiques agricoles. Concrètement, comme la quantité d’eau n’est plus suffisante pour permettre aux plantes ayant un cycle de 120 jours de se développer correctement, nous utilisons désormais des semences précoces, qui correspondent aux nouvelles périodes raccourcies de la saison des pluies.

Nous faisons également attention à la maîtrise du calendrier agricole ainsi qu’à la répartition de compost sur nos terres. Des cordons pierreux ainsi que des courbes de niveaux ont également été mis en place. Nous utilisons, entres autres, la plante Gliricidia pour le reboisement et la stabilité des sols.

Quel est votre rôle en tant qu’animateur ?

Je suis en train d’apprendre et d’aider d’autres producteurs pour les initier à ces pratiques. J’anime également des débats à la radio au sujet des semences améliorées. Je souhaite que grâce à tout cela, les producteurs changent de comportements et de pratiques rapidement.

Interview de Benoît BERNARD, agriculteur à Wanze en grandes cultures et éleveur de bœufs Angus, en Belgique.

Ressentez-vous les impacts du changement climatique au niveau de votre exploitation agricole ?

On ressent très fort les impacts du dérèglement climatique car il y a de plus en plus de périodes de sécheresse. Je pense que les quatre saisons sont de moins en moins marquées et que nous allons progressivement vers deux saisons, la saison sèche et la saison des pluies.

Quelles pratiques avez-vous mises en place pour faire face à ces changements ?

Cela fait plus de vingt ans que je ne laboure plus et que je fais attention au taux d’humus dans le sol, ce qui favorise le stockage de l’eau. Mon bétail n’est nourri qu’à l’herbe pour l’entretien des prairies et il est à l’air libre toute l’année. Nous avons également installé 4 hectares de cultures destinés à nourrir les animaux en hiver. Je replante également des arbres, haies et couverts végétaux pour éviter que le sol soit à nu et ne se dessèche.

Quelles sont vos aspirations pour le futur ?

Aujourd’hui, je suis tributaire d’industriels et je peine à vivre. Dans le système actuel, il y a des choses qui ne sont pas justes. Pour sortir de ce système il faut le comprendre, le vivre et être novateur, chercher des solutions. Le but, c’est de produire de manière plus propre et d’aller vers toujours plus de qualité du point de vue des sols et des humains. On rencontre beaucoup d’obstacles mais des choses se mettent en place, c’est quand même très positif. Nous devrions aussi favoriser les échanges humains et faire en sorte que plus de personnes travaillent dans les champs. Je pense que l’avenir de l’humain va repasser par la terre.

Ibrahima PAUL THIAW, coordinateur régional de la FONGS à Diourbel et expert paysan sur le changement climatique, au Sénégal.

Le Sénégal est composé de 6 grandes zones agroécologiques, avec un climat différent d’une zone à l’autre. L’impact du changement climatique n’est donc pas ressenti partout de la même manière. Quoi qu’il en soit, pour faire avancer la compréhension et le travail d’adaptation et de lutte contre le changement climatique, il faut travailler selon 5 axes :

> La perception : tout le monde ne comprend pas toujours ce que c’est et entre le nord du pays plus désertique et le sud plus tropical, les réalités ne sont pas les mêmes.

> La croyance : certain·e·s agriculteur·rice·s croient encore que c’est Dieu qui est à la manœuvre. « Chaque hivernage ressemble à son grand-père » dit l’adage ; les croyances et superstitions sont encore légion ici et suscitent des réactions attentistes.

> La connaissance : certain·e·s agriculteur·rice·s n’ont jamais entendu parler du changement climatique et ne savent pas exactement ce qu’est le climat. Alors, on fait de la sensibilisation en expliquant que c’est l’eau, la chaleur et le vent.

> Le temps : pour percevoir les changements du climat, il faut apprendre à s’inscrire dans la durée et non pas seulement considérer le dernier été ou la dernière saison des pluies.

> L’incidence et les aléas dans la zone : on doit apprendre à analyser les vents qui deviennent plus chauds et plus forts et les pluies qui sont progressivement moins nombreuses et plus diluviennes. Avant, la case était l’endroit pour l’agriculteur où se protéger en cas de chaleur extrême par exemple. Mais aujourd’hui, elle n’est plus assez efficace. Les politiques suivent pour pouvoir aller encore plus loin. Le travail n’est jamais fini. Aux décideurs et décideuses politiques de faire les bons choix pour garantir un système agricole résilient et durable.

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